samedi 4 juillet 2009

La pauvreté énergétique: qu'est ce que c'est?

Un ménage est pauvre sur le plan énergétique s’il n’est pas capable d’assurer le chauffage de son logement de manière continue et à un coût raisonnable (GORDON, 2002). Cette définition tirée de la littérature est celle utilisée dans les études menées dans les pays développés, précisément en Europe. Au Cameroun, la pauvreté énergétique est définie comme un manque d’accès des populations à des services énergétiques en qualité et en quantité, fiables, efficaces, durables et de manière continue[1].

Alors que la pauvreté énergétique est évaluée dans les pays développés pour les ménages qui disposent de l’électricité, celle-ci est définie au Cameroun en fonction du manque d’accès des ménages à cette source d’énergie. Selon cette dernière, sont considérés comme pauvres sur le plan énergétique, les ménages qui n’ont pas accès à l’électricité. La première approche quant à elle fait intervenir le seuil de pauvreté énergétique, qui correspond au montant des dépenses affecté à l’énergie, en-dessous duquel un ménage sera considéré comme non pauvre sur le plan énergétique. Selon la définition officielle en vigueur au Royaume Uni, sont considérés en situation de pauvreté énergétique les ménages qui doivent utiliser plus de 10% de leur revenu pour couvrir leurs dépenses énergétiques (DEFRA et DTI, 2001).
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Deux éléments principaux permettent de définir la pauvreté énergétique dans un ménage : les revenus et la consommation énergétique (DUBOIS, 2007).

Tout d’abord, la prise en compte du revenu dans la définition de la pauvreté permet de la représenter à travers un seuil ou ‘‘ligne de pauvreté’’, qui peut être absolue ou relative La ligne de pauvreté relative est définie par rapport à la distribution générale des revenus ou de la consommation dans un pays. La ligne de pauvreté absolue est quant à elle ‘‘associée à certaines normes absolues sur les éléments dont les ménages doivent disposer pour couvrir leurs besoins fondamentaux (COUDOUEL et al., 2002). Elle est souvent fondée sur des estimations du coût de certaines denrées de base, par exemple le coût d’un panier de biens nutritionnels.
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Cette approche est rarement employée pour définir la pauvreté énergétique, bien que certaines études l’emploient, à l’instar de celle menée par FOSTER et al., (2000), qui tentent de définir une ligne de «fuel poverty» à partir d’enquêtes sur les ménages au Guatemala. Ils utilisent pour cela les données sur les consommations énergétiques des ménages dont les dépenses par habitant se situent dans une bande de 10% autour de la ligne officielle de pauvreté. La définition employée au Royaume Uni ne fixe pas une telle ligne puisque sont considérées en situation de pauvreté énergétique les personnes qui doivent dépenser plus de 10% de leur revenu pour couvrir leur consommation d’énergie.

La définition de la pauvreté énergétique pourrait donc être représentée sur un graphique semblable à celui ci-dessous, où tous les ménages situés au-dessus de la ligne sont considérés comme pauvres sur le plan énergétique.
La pauvreté énergétique recouvre donc une réalité différente de la pauvreté en général. En effet, certaines personnes peuvent être pauvres mais non en situation de pauvreté énergétique, et réciproquement, il peut exister des personnes non-pauvres mais qui sont cependant en situation de pauvreté énergétique. Ce type de pauvreté n’est donc que partiellement lié aux revenus, puisqu’elle découle aussi de l’importance de la consommation énergétique des ménages.

Le niveau de la consommation énergétique entre dans la définition de la pauvreté énergétique au Royaume Uni, puisque celle-ci s’appuie sur les dépenses énergétiques que les consommateurs «doivent» effectuer. Tout d’abord, certains ménages peuvent affecter moins de 10% de leurs revenus à leur consommation énergétique alors qu’ils devraient consommer plus pour maintenir la température de leur logement à un niveau suffisamment élevé. Ces consommateurs rationnent leur consommation énergétique et il faut donc les inclure dans les populations en situation de pauvreté énergétique.

Ensuite, d’autres consommateurs peuvent dépenser plus de 10% de leurs revenus pour leur consommation énergétique sans pour autant «devoir» réaliser ces dépenses. Ces consommateurs présentent une surconsommation d’énergie, qui peut avoir différentes origines telles qu’un gaspillage, une mauvaise efficacité énergétique de leur logement, etc. Enfin, définir la pauvreté énergétique à partir du budget des ménages consacré aux dépenses énergétiques soulève la question du seuil de pauvreté énergétique.
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Quel est le seuil de pauvreté énergétique au Cameroun?
Quels sont les déterminants de la pauvreté énergétique au Cameroun?
Réduire la pauvreté énergétique peut elle permettre de réduire la pauvreté ?
Pour en savoir plus, se reférer à ma thèse de doctorat

Autres articles qui traitent de cette question: Le concept de pauvreté énergétique; ou en anglais The concept of energy poverty
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COUDOUEL, A. ; HENTSCHEL, J. S. et WODON, Q. T. (2002), ‘‘Mesure et analyse de la pauvreté’’, in : KLUGMAN, J. (Ed.), Poverty reduction strategy sourcebook, World Bank.
DEFRA et DTI (2001), The UK fuel poverty strategy, DTI, London
DUBOIS, U. (2007), ‘‘La pauvreté énergétique : quelles définitions ? Comment la mesurer ? ADIS - GRJM, Université de Paris Sud 11, Version préliminaire.
FOSTER, V., TRE, J. P. et WODON, Q. (2000) ‘‘Energy prices, energy efficiency, and fuel poverty’’, working paper, World Bank.
GORDON. D. (2002), ‘‘Predicting fuel poverty at small area level’’, Rapport, University of Bristol, Townsend Centre for International Poverty Research
[1] Définition tirée du Plan d’Action National Energie pour la Réduction de la Pauvreté (PANERP, 2005).